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Une perspective sur le retard de l’âge du mariage dans le monde arabe

La Femme dans le Développement et la Paix

De nombreuses coutumes sociales contribuent à la propagation du célibat dans les sociétés arabes. Parmi les plus notables, on peut citer l’attachement aux lignées, comme l’exigence pour une femme de se marier au sein de la même tribu ou qu’une femme de haute naissance (shérifa) épouse uniquement des membres de la même classe sociale. Cet usage, visant à préserver la pureté du sang, restreint considérablement les choix matrimoniaux. C’est ce que révèle une étude analytique sur la situation du mariage tardif dans le monde arabe en 2014.

L’étude a mis en évidence une tradition pratiquée dans la plupart des pays arabes, qui stipule que la sœur aînée doit se marier avant les plus jeunes, retardant ainsi les chances de mariage des autres. Cette coutume est désormais obsolète et entre en contradiction avec les enseignements religieux. Malgré cela, les peuples arabes continuent à s’y accrocher, et ce, en dépit d’un taux d’alphabétisation apparemment élevé.

Le concept de célibat

Le concept de « retard de l’âge du mariage », communément appelé “célibat tardif”, désigne le fait pour un individu de rester célibataire au-delà de l’âge considéré comme socialement approprié pour le mariage. Selon le dictionnaire, le célibat est défini comme “l’état de celui ou celle qui n’est pas marié(e)”. Cependant, lorsqu’il s’agit des femmes, le terme “vieilles filles” est souvent utilisé pour désigner celles qui dépassent l’âge traditionnel du mariage.

L’étude a aussi révélé que le phénomène de célibat se divise en deux types : premièrement, le célibat forcé, qui résulte de pressions sociales ou économiques empêchant la femme de se marier malgré son désir de le faire. Deuxièmement, le célibat choisi, qui reflète une décision personnelle de ne pas se marier, sans influence de facteurs externes, et est souvent lié à des raisons telles que l’ambition éducative ou professionnelle, la recherche de la liberté individuelle ou une personnalité préférant vivre de manière indépendante.

Dans le même contexte, le Centre d’Études et de Recherches du Golfe Arabe (CSRGULF) a révélé, dans un rapport de recherche publié en 2022, les dimensions du phénomène du retard de l’âge du mariage et ses répercussions, qui constituent un défi social majeur dans les sociétés arabes. Le rapport a souligné que ce phénomène, en constante expansion, affecte directement les taux de fécondité chez les jeunes, menaçant ainsi une baisse du pourcentage de jeunes dans la structure démographique arabe à moyen et long termes.

Le rapport a établi les taux de célibat et de mariage tardif dans un certain nombre de pays arabes, en se basant sur des estimations et des statistiques locales et internationales. Les Libanaises ont enregistré le taux de célibat le plus élevé dans le monde arabe, avec 85% pour la tranche d’âge de plus de 35 ans. Les Tunisiennes ont suivi en deuxième position avec 81%, tandis que l’Irak a enregistré un taux compris entre 70 et 85%. Les Émirats Arabes Unis ont enregistré des estimations comprises entre 70 et 75%, et la Syrie a atteint environ 70%. Au Maroc, le taux a atteint 60%, avec une augmentation notable d’environ 20% au cours de la dernière décennie.

Avec des taux moyens, la Jordanie a atteint 55%, soit une augmentation de 10% au cours de la dernière décennie, et l’Algérie 51%, un taux stable depuis 2013. L’Égypte a atteint 48%, avec une augmentation de 8% depuis 2013, tandis que la Libye a atteint 35%, un taux estimé similaire à celui de 2013. Au Qatar, le taux se situe entre 26 et 35% avec une baisse de la volonté de se marier et une augmentation des divorces. Au Koweït, les taux ont oscillé entre 22 et 35% en l’absence de statistiques officielles précises, tandis que le Yémen a atteint, de manière estimative, 30% en raison des conflits et de leurs répercussions.

Parmi les pays arabes affichant les taux de célibat les plus bas, on trouve l’Arabie Saoudite ; le taux de célibat y a diminué pour atteindre 10% selon les statistiques officielles, contre une estimation de 45% en 2013. Cependant, d’autres estimations suggèrent qu’environ 40% des femmes de plus de 35 ans sont célibataires. Bahreïn, quant à elle, aurait atteint un taux estimé de 25%. La Palestine, de son côté, a enregistré le taux de célibat le plus bas du monde arabe avec 12%, parallèlement à une baisse significative des mariages précoces.

Rapports arabes

Le rapport met en garde contre les effets négatifs du retard dans le mariage sur les sociétés arabes, notamment le déclin de la fécondité, la priorité donnée à l’éducation et au travail au détriment du mariage, et l’augmentation de l’autonomie individuelle, en particulier chez les femmes, ce qui pourrait entraîner des changements dans la structure de la famille arabe. Par conséquent, le rapport recommande de prendre des mesures pour soutenir les jeunes Arabes et faciliter le mariage, en réduisant les coûts du mariage, en offrant des incitations économiques et sociales, et en renforçant la stabilité professionnelle et psychologique des jeunes.

D’autre part, un rapport publié en 2017 par le Central Agency for Public Mobilization and Statistics en Égypte a révélé des chiffres significatifs concernant le taux de célibat dans le pays. En effet, le nombre de célibataires âgés de plus de 30 ans a atteint environ 13,5 millions de personnes (2,5 millions d’hommes et 11 millions de femmes).

Les campagnes sociales liées au mariage, telles que “Khalliha Ta’anas” et les contre-campagnes qui ont suivi comme “Khlik Janb Ommak” et “Khallih Ykhallal”, reflètent une tension sociale et économique croissante autour du mariage dans les sociétés arabes.

Les dernières statistiques publiées par des organisations de défense des droits des femmes en Irak révèlent une augmentation significative des taux de célibat. Près de 70% des femmes en âge de se marier sont célibataires, selon ces chiffres. Ces données mettent en évidence les importants défis sociaux et économiques qui pèsent sur les perspectives de mariage dans la région.

Les statistiques de l’Organisation internationale du Travail en Irak ont révélé qu’un maigre 14% seulement des femmes irakiennes travaillent en dehors du foyer, ce qui représente le taux le plus bas au monde. Cette statistique reflète l’incapacité de la femme irakienne à atteindre l’indépendance financière, faute de revenus propres. Cela limite considérablement sa capacité à prendre des décisions autonomes dans sa vie.

60% des femmes irakiennes ont subi des violences de la part de leurs maris, ce qui constitue l’un des principaux facteurs contribuant à l’augmentation des taux de divorce et à la réticence à se marier dans le pays. Ces conditions socio-économiques représentent un défi majeur pour l’amélioration de la condition féminine, l’offre d’opportunités de mariage et une vie stable.

Les statistiques officielles algériennes indiquent qu’environ 51% des femmes en Algérie sont célibataires. En effet, près de quatre millions de femmes n’étaient pas mariées en 2010, bien qu’elles aient dépassé l’âge de 34 ans.

Dans le même contexte, des médias syriens ont confirmé que le taux de célibat en Syrie a atteint 70% en raison du conflit qui dure depuis des années, ainsi qu’en raison de l’augmentation des coûts du mariage, des dot élevées et des dépenses exorbitantes des mariages pour les jeunes, ce qui a été encore compliqué par les crises résultant du conflit.

Une étude menée par le sociologue jordanien, le Dr Ismaël Al-Zayoud, intitulée « La réalité du célibat dans le monde arabe », a révélé que 50% des jeunes hommes syriens et 60% des jeunes femmes syriennes ne se sont pas mariés. Cela signifie que le pourcentage total de célibataires en Syrie atteint environ 55%. Ces chiffres reflètent les impacts de la guerre en cours dans le pays, qui a entraîné des changements radicaux dans la vie sociale et économique.

Le Célibat au Yémen

Le phénomène de célibat dans de nombreux pays arabes, en particulier au Yémen, est devenu un enjeu social qui exige une étude approfondie pour comprendre les causes profondes qui en sont à l’origine et identifier les moyens de le traiter. Dans ce contexte, le besoin se fait de plus en plus pressant de mener des recherches rigoureuses pour mettre en lumière les facteurs qui contribuent à la propagation de ce phénomène, tels que la perception sociale de la femme, les coutumes tribales prévalantes et le coût élevé du mariage.

Selon une étude précédente menée par la chercheuse Chouroq Bamouqbel, la perception de la femme au sein de la société yéménite, ainsi que l’influence de la culture tribale dominante, jouent un rôle majeur dans la réticence des jeunes à épouser des femmes actives dans la vie publique ou professionnelle.

D’autre part, l’écrivain et analyste politique Abdel Bari Taher considère que le problème du célibat au Yémen est étroitement lié à la pauvreté, aux coutumes et traditions tribales obsolètes, ainsi qu’à la situation économique désastreuse du pays. En effet, l’absence d’emplois et la difficulté à assurer les besoins de base poussent les jeunes Yéménites à réfléchir à deux fois avant de se marier, ce qui exacerbe le phénomène.

De nombreux activistes et juristes insistent sur la nécessité de traiter cette question en menant des campagnes de sensibilisation à l’échelle de la société, afin de sensibiliser les parents et tuteurs sur l’importance de permettre aux filles de se marier lorsque les conditions sont réunies, conformément aux exigences de la loi religieuse et civile. Ils soulignent que le fait d’empêcher une fille de se marier sans raison valable constitue une violation de la loi religieuse et civile, et qu’il peut en résulter des conséquences sociales et sanitaires qui pourraient affecter la vie future de la fille.

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