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Les établissements pénitentiaires pour mineurs au Yémen :  Entre fonction sociale et manque de ressources

Haneen Al-Wahsh – Sawt Al-Amal (La Voix de l’Espoir)

Rien n’apparaît à l’horizon, alors que le Yémen entre dans un nouveau cycle de complications à la lumière des changements régionaux et des inquiétudes qu’ils suscitent ; cela se produit alors que le Yémen reste l’un des pires pays et l’un des plus violateurs des droits de l’enfance.

Des rapports internationaux récents indiquent qu’environ 10 millions d’enfants au Yémen ont un besoin urgent d’aide humanitaire, dans un pays où plus de la moitié de la population nécessite un soutien vital. Avec la détérioration des conditions de vie et l’augmentation rapide du nombre de personnes déplacées, la plupart des familles vivent dans des conditions désastreuses, ce qui a entraîné une augmentation de la criminalité parmi les enfants, certains finissant par se retrouver en établissement pénitentiaire pour mineurs.

D’un coup d’œil, on peut noter que le rôle des organisations locales et internationales au Yémen pour les enfants en conflit avec la loi est crucial. Ces organisations doivent jouer un rôle vital pour aider ces enfants à surmonter les difficultés qu’ils traversent et leur fournir la protection et le soutien nécessaires. Cela passe par la fourniture de services essentiels, tels que la nourriture, les médicaments, les vêtements et l’abri, notamment en période de crises et de conflits qui sévissent au Yémen.

De plus, il est de leur devoir de fournir les soins de santé nécessaires aux enfants, de leur offrir des opportunités éducatives et de les encourager à poursuivre leur scolarité. Elles aident également les enfants ayant subi des violences ou des abus à se réhabiliter sur les plans psychologique et social, en leur offrant un environnement sécurisé. Elles mettent en œuvre des programmes de sensibilisation communautaire sur l’importance de la protection des droits de l’enfant et encouragent à signaler les cas de maltraitance et d’exploitation.

En outre, le rôle des organisations, qu’elles soient locales ou internationales, consiste à faire pression sur les gouvernements et les autorités officielles pour qu’ils assurent la protection nécessaire aux enfants, en particulier aux enfants en conflit avec la loi, et qu’ils appliquent les lois relatives aux droits de l’enfant. Ces organisations doivent également travailler ensemble pour renforcer les capacités des institutions locales œuvrant dans le domaine de la protection de l’enfance, en leur fournissant les compétences et les connaissances requises.

Cependant, de nombreuses organisations et institutions, tant locales qu’internationales, continuent de faire face à des défis qui réduisent leur rôle escompté dans l’amélioration des conditions des enfants en conflit avec la loi au Yémen. Parmi les principaux défis auxquels ces organisations sont confrontées actuellement, figurent les conflits qui impactent fortement leur travail et limitent leur capacité à atteindre les enfants, ainsi que le manque de financement, qui restreint leur capacité à étendre leur champ d’action.

Bien que l’existence d’établissements pénitentiaires pour mineurs soit cruciale pour la réhabilitation des enfants condamnés pour des affaires criminelles et des enfants sans abri, leur situation au Yémen n’est guère moins tragique que celle de l’enfance elle-même, comme c’est le cas à l’établissement pénitentiaire pour mineurs à Aden, par exemple.

Des ressources limitées

En 2018, l’établissement pénitentiaire pour mineurs à Aden a repris ses activités après que le ministère des Affaires sociales et du Travail ait terminé des réformes dans l’établissement et l’ait approvisionné en certains équipements nécessaires et urgents, ce qui a conduit à l’accueil de plusieurs enfants envoyés par le tribunal pour mineurs.

En 2021, l’établissement pénitentiaire pour mineurs situé dans la ville de Al-Sha’ab a accueilli environ de 70 enfants, dont la moitié de filles. Certains d’entre eux étaient impliqués dans des crimes tels que des vols, des meurtres, des viols et la prostitution. Les responsables de l’établissement affirment que ces enfants doivent être considérés comme des victimes de la désintégration familiale, et non comme des délinquants.

En 2022, l’établissement pénitentiaire pour mineurs a bénéficié du soutien de Le Comité international de secours « International Rescue Committee » (IRC), qui a entièrement rénové le bâtiment. Cela a inclus la rénovation du pavillon pour filles, ainsi que l’amélioration des chambres d’hébergement, des bureaux, de la cuisine et des sanitaires. Cependant, les responsables de l’établissement signalent que bien que le bâtiment ait été récemment construit et équipé, il manque des éléments essentiels à la vie quotidienne. L’absence de budget opérationnel et le manque de services de base compromettent ses fonctions sociales, éducatives et psychologiques, faisant qu’il se transforme en prison.

Quarante filles dans l’établissement pénitentiaire pour mineurs manquent des services les plus élémentaires, à l’exception des repas simples fournis par la charité, le soutien officiel étant totalement absent. La présence des organisations est presque inexistante, avec seulement quelques visites sur le terrain qui, selon les responsables de l’établissement : « C’est peine perdue et ne sert à rien ».

La Dre. Salwa Abdullah Salem, conseillère du ministre de la Justice pour les affaires des femmes et des enfants et directrice générale des femmes et des enfants au ministère de la Justice, affirme : « L’établissement pour mineurs de la ville de Sha’ab, en tant que seul établissement de ce type à Aden et dans les gouvernorats voisins, accueille des enfants provenant de différents gouvernorats telles qu’ Abyan, Shabwa, Lahj et d’Ad Dali’, après leur renvoi par les tribunaux compétents ».

Elle indique : « Bien que l’établissement dispose de vastes espaces et chambres, il lui manque des services essentiels pour les enfants, tels que des programmes éducatifs et sanitaires, ainsi que des activités de réhabilitation sociale et professionnelle, comme la formation aux métiers manuels ». Elle ajoute que la pénurie de ressources a conduit l’établissement à mettre en place des programmes sportifs simples, tels que le football et le tennis, qui sont proposés pendant une courte période par le superviseur social.

« Nous voulons apprendre »

Le Yémen approche du début d’une nouvelle année scolaire, tandis que des estimations récentes des Nations Unies indiquent que 4,5 millions d’enfants yéménites ne vont pas à l’école, soit deux enfants sur cinq, selon un rapport récent de l’organisation « Save the Children ». Alors que la fréquentation scolaire des enfants diminue, l’éducation reste le premier souhait des enfants rencontrés dans l’établissement pénitentiaire. « Nous voulons apprendre », ont-ils tous crié en chœur.

« La réalisation de ce rêve nécessite une intervention urgente des organisations concernées par l’enfance. Nous devons garantir le droit de ces enfants à l’éducation, soit par l’adoption de programmes d’alphabétisation, soit en leur permettant de s’inscrire dans certaines écoles, en coordination avec le ministère de l’Éducation », selon la Dre. Salwa

Les responsables de l’établissement affirment que la plupart des enfants en conflit avec la loi sont des déplacés qui ne savent pas lire ni écrire, malgré l’approche de l’âge adulte pour certains d’entre eux. C’est un problème que l’établissement n’a pas réussi à résoudre, malgré les efforts considérables déployés pour faire face aux besoins les plus élémentaires.

Des appels urgents

« À travers vous, je lance un appel urgent aux organisations opérant dans la région, ainsi qu’au gouvernement, au ministère des Affaires sociales et du Travail, et aux autorités locales, pour qu’ils portent une attention rapide aux enfants de l’établissement pénitentiaire pour mineurs », c’est un appel de la conseillère du ministre de la Justice pour les affaires de la femme et de l’enfant, soulignant que tout ce qui maintient la maison en activité ce sont les efforts personnels déployés par le tribunal pour mineurs et les responsables de l’établissement.

L’établissement pénitentiaire pour mineurs situé dans la ville de Sha’ab a lancé un appel urgent au début de l’année 2024 à travers plusieurs sites de presse, demandant la fourniture d’un budget opérationnel pour faire face aux besoins urgents et essentiels en matière de nourriture. Ils ajoutent que la maison a un besoin pressant de matériel pour équiper la cuisine, ainsi que de lits, couvertures, oreillers et matelas pour les dortoirs des mineurs. Il est important de noter que l’établissement des mineurs à Aden était le seul dans le pays avant l’ouverture d’un autre à Hadramaout.

« L’établissement des mineurs est confronté à des défis majeurs, notamment le manque de spécialistes en psychologie et en travail social », d’après la Dre. Salwa. Elle estime que faire face à ces défis ne pourra réussir véritablement que si des programmes de formation professionnelle pour les mineurs sont mis en place, tels que l’apprentissage des métiers manuels, ainsi que d’autres programmes éducatifs. Elle souligne que ces programmes constitueront, une fois les mineurs diplômés, une source essentielle pour les aider à changer la réalité imposée par la détérioration économique et le déchirement social que traverse le pays.

Il est à noter que l’UNICEF a récemment lancé un programme de droits pour les mineurs, en coordination avec le ministère de la Justice. Ce programme vise à fournir des avocats aux mineurs délinquants qui n’ont pas atteint l’âge légal pour être jugés, en les transférant au tribunal et au parquet des mineurs. Les avocats sont chargés d’examiner et de suivre les affaires des enfants avant que ceux dont les jugements sont rendus ne soient envoyés à la maison des mineurs.

En raison du désintérêt des acteurs humanitaires pour les besoins de la maison des mineurs, la réalité indique qu’un avenir incertain et plus sombre attend un nombre considérable d’enfants condamnés pour des affaires criminelles urgentes, ainsi que pour d’autres affaires potentiellement graves et reportées.

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